Asthme et allergies chez l'enfant : rôle des facteurs environnementaux et programmes de prévention

Après avoir progressé de manière significative au cours des dernières décennies, la prévalence de l'asthme et des maladies allergiques demeure relativement élevée dans les pays industrialisés. Il y a donc lieu de s'intéresser aux causes, mais également à la façon d'en prévenir les manifestations, notamment pour fournir aux professionnels de la santé des informations appropriées et récentes quant aux mesures de prévention à transmettre à la population et à appliquer dans les divers milieux de vie.

Pour ce faire, nous avons réalisé une revue des connaissances sur le rôle des contaminants biologiques et de leurs composantes dans la prévention de l'asthme et de l'allergie. Compte tenu de l'intérêt marqué que suscite l'hypothèse hygiéniste auprès de la communauté scientifique, voire même de la population en général, nous avons recensé et pris connaissance des résultats des recherches récentes traitant de cette théorie. Il appert que l'hypothèse hygiénique offre des perspectives intéressantes, mais encore insuffisamment étayées pour servir de base à des recommandations. Compte tenu des incertitudes entourant la pertinence de mesures allant dans le sens de cette théorie, il s'avère essentiel de s'en tenir aux mesures de prévention qui font l'objet d'un consensus dans le milieu de la santé.

À partir du nombre total des naissances en 2009 au Québec, nous avons estimé qu'environ 70 % des nouveau-nés étaient à faible risque de développement d'allergies, 25 % à risque modéré et 5 % à risque élevé. En combinant ces données avec la probabilité que ces derniers aient de développer des manifestations allergiques en fonction de l'histoire familiale, nous avons estimé qu'environ 38 % des nouveaux cas d'asthme étaient susceptibles de survenir chez les enfants à risque faible, 45 % chez les enfants à risque modéré et 18 % chez ceux à risque élevé. Ces données indiquent donc qu'il est justifié de cibler non seulement les enfants à risque élevé d'allergies, mais également ceux à risque modéré et faible pour l'application des mesures de prévention.

Plusieurs recommandations concernent l'évitement de l'exposition ou le contrôle de facteurs environnementaux, tels que les aéroallergènes et la fumée de tabac. Des mesures ciblées qui tiennent compte des recommandations des groupes d'experts devraient être mises en vigueur dans le cadre de programmes de prévention multifactoriels. Ces programmes gagneraient à être développés en considérant le milieu de vie concerné (habitations, garderies, écoles, etc.) afin de les adapter au contexte qui lui est propre.

À la lumière des propos de la présente revue des connaissances, les auteurs font les constats suivants :

  • le développement de l'allergie et de l'asthme est influencé par des facteurs individuels et environnementaux. Tandis que plusieurs facteurs environnementaux susceptibles de constituer des éléments déclencheurs d'allergie ont depuis longtemps été identifiés, d'autres pourraient être protecteurs, mais demeurent pour l'instant peu connus. Les études sur le sujet en sont à leur début et il subsiste encore beaucoup d'incertitudes à cet égard;
  • dans les milieux scientifique et professionnel, des consensus ont été établis concernant les recommandations de certaines mesures de prévention primaire, secondaire et tertiaire en lien avec des facteurs environnementaux. Aucune recommandation en lien avec l'hypothèse hygiéniste n'a encore été formulée par les groupes d'experts;
  • la mise en place de programmes de prévention primaire basés sur des facteurs environnementaux apparaît justifiée lorsqu'elle est réalisée selon une approche multifactorielle;
  • ces programmes devraient viser les populations cibles (femmes enceintes, nourrissons, jeunes enfants), quel que soit leur niveau de risque de développement de l'allergie (élevé, modéré ou faible);
  • dans le cadre de programmes de prévention secondaire, la pertinence et la faisabilité d'avoir recours au support de conseillers en environnement intérieur pour les clientèles défavorisées au Québec devraient être évaluées;
  • les récents développements sur l'évolution des concepts associés à l'hypothèse hygiéniste en milieu fermier traditionnel sont prometteurs, en termes de prévention, d'un point de vue de santé publique. Il apparaît donc important de mettre en place une veille scientifique sur le sujet et d'évaluer la pertinence et la faisabilité de réaliser un projet de recherche en lien avec cette hypothèse dans le contexte de vie québécois.
Auteur(-trice)s
Pierre Lajoie
M.D., M. Sc., FRCPC, médecin-conseil, Institut national de santé publique du Québec
Jean-Marc Leclerc
M. Sc., conseiller scientifique, Institut national de santé publique du Québec
Pierre Chevalier
Ph. D., conseiller scientifique, Institut national de santé publique du Québec
Type de publication
ISBN (électronique)
978-2-550-68347-6
ISBN (imprimé)
978-2-550-68346-9
Notice Santécom
Date de publication