Sommaire sur la vigie des manifestations cliniques inhabituelles après la vaccination contre la COVID-19 au Québec déclarées dans le cadre de la surveillance passive

Au Québec, un programme de surveillance de la sécurité des vaccins est en place depuis 1990. En vertu de la loi sur la santé publique, les professionnels de la santé doivent déclarer les manifestations cliniques inhabituelles (MCI) qui surviennent après la vaccination. Les données issues de ce système de surveillance passive ne permettent pas d’établir un lien de causalité entre la vaccination et les MCI, mais visent à identifier les signaux pouvant faire l’objet d’une évaluation plus approfondie pour évaluer la causalité. Les données présentées dans ce sommaire ont été extraites du système d’information pour la protection en maladies infectieuses (SI-PMI) le 1er novembre 2021, mais elles concernent des personnes vaccinées contre la COVID-19 du 14 décembre 2020 au 30 septembre 2021.

Faits saillants

Données de vigie

  • En date du 30 septembre 2021, 12 911 736 doses de vaccins contre la COVID-19 avaient été administrées au Québec incluant 6 615 599 1res doses et 6 238 985 2es doses. La quasi-totalité (95 %) des doses administrées étaient des vaccins à ARN messager, dont 77 % étaient avec le vaccin de Pfizer-BioNTech.
  • Dans le cadre de la surveillance passive au Québec, il y a eu un total de 8 933 déclarations de MCI après l’administration d’un vaccin contre la COVID-19. Ceci correspond à un taux de déclaration de 69,2/100 000 doses administrées (tableau 1).
  • Puisque plusieurs manifestations peuvent être déclarées pour une même personne (ex. fièvre et réaction locale), le nombre total de MCI est de 10 184, correspondant à un taux de MCI de 78,9 par 100 000 doses administrées.
  • Avec près de 13 millions de doses administrées, il y a eu environ une déclaration de MCI par 1 450 doses administrées.
  • Environ 9 % (n = 798) de l’ensemble des déclarations concernaient des manifestations considérées graves1, correspondant à un taux de 6,2 par 100 000 doses administrées.
  • Les taux de déclaration par 100 000 doses administrées étaient plus élevés dans les premières semaines suivant le début de la campagne de vaccination contre la COVID-19 au Québec en décembre 2020 (figure 1). La même tendance est observée pour les taux de MCI graves.
  • Les réactions locales au site d’injection représentent environ 21 % des MCI et la majorité de ces réactions ont été déclarées à la suite de l’administration du vaccin de Moderna (tableau 1). Une investigation de ce signal a montré que le taux plus élevé observé à la suite de l’administration du vaccin de Moderna était associé à la survenue de réactions locales plus tardivement2 après la vaccination qu’avec les autres vaccins. L’analyse de ce signal a pu démontrer que ces réactions locales n’étaient pas plus importantes ou graves et les orientations de surveillance ont été modifiées. On a d’ailleurs vu une diminution du taux de déclaration des réactions locales associées à ce vaccin dans le temps.
  • Les réactions systémiques (ex. fièvre, éruptions cutanées sans prurit, vomissements/diarrhées) représentent environ 12 % des MCI.
  • Parmi les manifestations neurologiques déclarées, qui représentent 13 % des MCI, ce sont les anesthésies/paresthésies3 qui affichent le taux le plus élevé, soit 6,3 par 100 000 doses administrées (tableau 1).
  • Le taux d’anaphylaxie suivant l’administration d’un vaccin contre la COVID-19 est faible, soit de 1,8/100 000 doses administrées. Bien qu’il soit plus élevé que ce qui est normalement attendu à la suite de la vaccination (0,1 à 1/100 000 doses)4, il apparaît similaire à celui observé lors de la campagne de vaccination contre la grippe pandémique A(H1N1) réalisée au Québec en 20095. Chacune de ces déclarations d’anaphylaxie a fait l’objet d’une révision en fonction d’une définition standardisée. 
  • Les manifestations déclarées dans « autres MCI » sont celles qui sont considérées graves ou inhabituelles par le déclarant, et qui ne correspondent pas à une manifestation prédéfinie dans le formulaire de déclaration. Les autres MCI ont été analysées et classées par systèmes (ex. manifestations neurologiques, cardiaques, etc.). On a pu observer notamment que :
  • Les manifestations associées aux systèmes neurologique, cardiaque et dermatologique étaient les plus fréquentes. Il s’agit par exemple de céphalées, migraines et étourdissements pour le système neurologique ; de douleur thoracique, palpitations et myocardites/péricardites pour le système cardiaque et d’éruptions cutanées et œdème localisé pour le système dermatologique.
  • Pour les manifestations cardiaques, les déclarations reçues à la suite de l’administration du vaccin de Pfizer-BioNTech étaient proportionnellement plus élevées que pour les autres vaccins. Pour les manifestations neurologiques, c’est à la suite du vaccin d’AstraZeneca6 qu’elles étaient plus élevées.
  • Le profil de sécurité varie selon le vaccin :
  • L’évolution des déclarations de MCI en fonction du vaccin reflète les activités de vaccination au Québec (figure 2).
  • Le taux de déclaration est plus élevé suivant l’administration du vaccin d’AstraZeneca, suivi de celui de Moderna et de Pfizer-BioNTech (tableau 1, figure 3).
  • Le taux de déclaration varie selon l’âge et le sexe de la personne vaccinée :
  • Pour le vaccin de Pfizer-BioNTech, des taux plus faibles sont observés chez les plus jeunes et les personnes plus âgées (figure 3);
  • Des taux plus élevés sont observés chez les femmes dans tous les groupes d’âge à l’exception des 12-17 ans, et selon les différentes catégories de manifestations (figures 4 et 5), ce qui n’est pas un phénomène inhabituel en sécurité vaccinale.
  • L’analyse des déclarations selon le rang de la dose suggère un taux plus élevé suivant l’administration de la dose 1 comparativement à la dose 2 (figure 6) :
  • Ces résultats peuvent s’expliquer entre autres par une déclaration plus importante suivant l’implantation de cette nouvelle campagne de vaccination et de l’intérêt médiatique entourant cette dernière;
  • Cette tendance est observée pour tous les vaccins, mais le rapport de taux entre la dose 1 et la dose 2 apparaît plus élevé pour le vaccin d’AstraZeneca que pour celui de Moderna et de Pfizer-BioNTech.

1 Les MCI graves sont définies comme des MCI ayant nécessité une hospitalisation (24 heures ou plus), ayant menacé la vie (choc anaphylactique, anaphylaxie), ayant amené des séquelles ou suivies d’un décès. Une seule MCI grave est comptabilisée par personne pour une dose de vaccin reçue.
2 C’est-à-dire qu’elles sont survenues vers le 7e ou 8e jour après la vaccination.
3 On entend par anesthésie une absence de sensation normale, particulièrement la sensibilité à la douleur, dans le territoire de distribution d’un ou plusieurs nerfs. En ce qui concerne la paresthésie, il s’agit d’un engourdissement ou d’une sensation de picotement dans le territoire de distribution d’un ou plusieurs nerfs.
4 Référence : Protocole d’immunisation du Québec, 2021. Consulté en ligne le 15 novembre 2021 : https://www.msss.gouv.qc.ca/professionnels/vaccination/piq-manifestations-cliniques-apres-la-vaccination/types-de-manifestations-cliniques-possibles/.
5 Rouleau I., De Serres G., Drolet JP., Skowronski DM., Ouakki M., Toth E., et al. Increased risk of anaphylaxis following administration of 2009 AS03-adjuvanted monovalent pandemic A/H1N1 (H1N1pdm09) vaccine. Vaccine 2013; 31: 5989-5996.
6 Incluant le vaccin COVISHIELD.