Le dépistage de la syphilis chez la femme enceinte

En 2003, le Comité consultatif sur les infections transmissibles sexuellement (CCITS) émettait un document traitant des enjeux de santé publique soulevés par la flambée épidémique de syphilis détectée quelques mois plus tôt. Ce document contenait plusieurs recommandations, dont certaines visaient à prévenir la syphilis congénitale. Le ministère de la Santé et des services Sociaux (MSSS) a demandé à l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) de déterminer si ces recommandations étaient nécessaires et suffisantes pour prévenir la syphilis congénitale au Québec.

Il faut comprendre qu’il sera toujours impossible d’arrêter complètement la transmission de la syphilis aux femmes enceintes et la survenue subséquente de la syphilis congénitale.

Toutefois dans le but d’en prévenir le plus grand nombre possible et devant la convergence des recommandations existantes et des avis formulés par les experts que nous avons consultés, nous croyons non seulement nécessaire d’entériner les recommandations faites par le CCITS en 2003 mais aussi de renforcer celle qui concerne les femmes enceintes à risque plus élevé d’avoir été exposées à la syphilis.

Considérant :

  • que le Québec connaît une recrudescence de la syphilis;
  • que les taux d’incidence ne redescendront pas aux planchers d’incidence de la fin des années ’90 avant un certain temps;
  • que le nombre de cas féminins a augmenté et que certaines de ces femmes sont en âge de procréer;
  • que le dépistage ciblé sur les facteurs de risque a donné des résultats décevants dans le cadre de la prévention des infections au VIH et de celui de l’hépatite B;
  • que la syphilis est aisément transmissible d’une femme enceinte à son fœtus;
  • que la survenue de la syphilis congénitale peut être facilement évitée par le traitement précoce de la femme enceinte infectée;
  • que la syphilis congénitale est le plus souvent asymptomatique et qu’il n’y a pas de test sérologique suffisamment performant pour établir le diagnostic à la naissance;
  • que la syphilis congénitale mène à une mortalité et à une morbidité importante chez les enfants à naître ainsi qu’à des séquelles importantes;
  • que le traitement des enfants infectés nécessite une prolongation de l’hospitalisation du nouveau-né de près de deux semaines et soumet ceux-ci à des procédures diagnostiques supplémentaires;
  • que le suivi des nouveaux-nés atteints s’impose pour une durée pouvant aller jusqu’à 18 mois, et que ce suivi est parfois difficile à compléter;
  • que les lignes directrices canadiennes et américaines préconisent le dépistage universel de la syphilis chez les femmes enceintes;
  • que des dépistages prénataux sont déjà faits dans la majorité des grossesses au Québec et ne représentent pas de coûts supplémentaires élevés pour le système de santé;
  • et que les experts sont d’avis qu’il faut être aussi exigeant face à la prévention de la syphilis congénitale qu’à celle de l’infection au VIH, de l’hépatite B, du streptocoque de groupe B ou de la rubéole.

L’Institut national de santé publique du Québec soutient les recommandations suivantes telles qu’émises en 2003 par le comité consultatif ITSS proposant :

  • le dépistage systématique de la syphilis à la première visite de grossesse et le suivi biomédical approprié des femmes avec un résultat positif;
  • la recherche systématique du résultat du dépistage au moment de l’accouchement et, chez celles dont le résultat n’est pas disponible, l’analyse immédiate d’un nouveau prélèvement sanguin.

Pour ces mêmes raisons, malgré qu’il soit difficile dans certains contextes de documenter le niveau de risque et considérant le risque de contracter la syphilis en cours de grossesse, l’Institut national de santé publique du Québec est d’avis qu’il est nécessaire de renforcer la recommandation qui proposait :

« Chez les femmes à haut risque chez lesquelles une exposition en cours de grossesse est possible, il pourrait être pertinent de répéter le dépistage vers la 28e semaine de grossesse. »

Nous recommandons plutôt que :

  • chez les femmes à haut risque chez lesquelles une ou des expositions en cours de grossesse sont possibles, il est pertinent de répéter le dépistage, au besoin plus d’une fois et au minimum une fois vers la 28e semaine de grossesse et au moment de l’accouchement.

L’Institut national de santé publique du Québec recommande aussi :

  • que ces recommandations soient réévaluées d’ici deux à trois ans et corrigées, si nécessaire, en fonction de l’épidémiologie de la syphilis et de l’évolution du contexte.

 

Auteur(-trice)s
Marc Dionne
Institut national de santé publique du Québec
Type de publication
ISBN (électronique)
2-550-46603-9
ISBN (imprimé)
2-550-46604-7
Notice Santécom
Date de publication