La vaccination contre l'influenza des travailleurs des industries avicole et porcine

Le présent avis a été produit en réponse à une demande du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) à l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). Le ministère désirait savoir si la vaccination annuelle contre l'influenza devait être recommandée aux travailleurs des industries aviaire et porcine du Québec dans le but de prévenir l'infection de ces personnes par le virus humain, réduisant ainsi le risque théorique de réassortiment des gènes des virus influenza humains, aviaires ou porcins advenant une co-infection par des virus d'origine différente. De plus, si la vaccination annuelle était recommandée, on demandait de préciser si des distinctions devaient être faites en fonction des différents groupes de travailleurs ou des tâches effectuées.

Le présent avis se limite aux données scientifiques et opérationnelles relatives à l'immunisation des travailleurs. Un avis complémentaire de santé au travail qui traitera notamment du degré d'exposition potentielle des divers groupes de travailleurs et des mesures de protection outre la vaccination sera produit ultérieurement par le Groupe d'intérêt pour les risques biologiques en milieu de travail.

Une revue de la littérature a été effectuée à partir de PubMed en utilisant les mots-clés suivants : avian influenza, pig influenza, transmission, influenza vaccine, prevention. Le site Internet du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation (MAPAQ) a également été consulté; des informations complémentaires sur la surveillance ont été obtenues du Bureau de surveillance épidémiologique du MSSS.

On abordera tout d'abord les considérations scientifiques pertinentes sur les caractéristiques des virus de l'influenza aviaire et porcine et à leur transmission possible aux humains. Les recommandations de divers organismes à l'égard de la vaccination de ces travailleurs seront ensuite amenées. Plus loin, les considérations opérationnelles seront discutées. Enfin, à la lumière des divers éléments présentés, des recommandations seront émises.

Considérant que :

  • Deux mécanismes pourraient entraîner l’émergence d’une souche influenza à potentiel pandémique : la mutation adaptative d’un virus influenza aviaire ou le réassortiment génétique entre une souche influenza aviaire et une souche influenza humaine.
  • Le réassortiment génétique a déjà eu lieu chez le porc et pourrait théoriquement avoir lieu chez l’homme.
  • Les virus influenza porcins circulant au Québec sont de même sous type que ceux qui infectent l’humain (H1N1 et H3N2). Il est peu probable qu’un virus pandémique émerge de réassortiment entre un virus influenza purement porcin et un virus influenza humain.
  • Le MAPAQ sensibilise les producteurs de porc et de volaille à la nécessité de mettre en place des mesures de biosécurité de manière à réduire le plus possible l’introduction de maladies infectieuses dans leurs élevages.
  • Des réseaux de surveillance sentinelle aviaire et porcine sont en place et devraient permettre l’identification des éclosions d’influenza aviaire chez les porcs et les volailles.
  • Les couvertures vaccinales obtenues dans d’autres groupes d’individus visés par le programme actuel de vaccination contre l’influenza mais par ailleurs en bonne santé (ex. : travailleurs de la santé) sont faibles.

Il apparaît raisonnable de penser que :

  • La vaccination des travailleurs des personnes exposées aux virus aviaires pourrait théoriquement empêcher la co-infection par des virus aviaires et humains et ainsi le réassortiment génétique pouvant mener à l’émergence d’une souche à potentiel pandémique.
  • La vaccination annuelle des travailleurs susceptibles d’être exposés à des porcs ou des volailles infectés conduirait vraisemblablement à des couvertures vaccinales faibles n’empêchant pas l’intervention en cas d’éclosion.
  • L’impact de santé publique de cette intervention à l’échelle planétaire, soit la prévention de l’apparition d’un virus à potentiel pandémique au Québec, serait probablement négligeable.

Par conséquent, dans le contexte actuel, nous recommandons de privilégier le scénario I A, soit la vaccination contre l’influenza des travailleurs (et autres personnes exposées) suite à la découverte d’une éclosion d’influenza aviaire chez les porcs ou la volaille.

En conclusion, à la lumière des données présentées jusqu’à maintenant, il est clair que la seule justification à la vaccination des travailleurs des industries avicole ou porcine reste pour éviter un risque théorique et minime de réassortiment génétique entre une souche influenza aviaire et une souche influenza humaine. Ce risque théorique serait présent en contexte d’éclosion animale ou d’épizootie d’influenza aviaire. Les outils développés par les réseaux de surveillance aviaire et porcine devraient permettre d’identifier les éclosions d’influenza aviaire nécessitant une intervention de vaccination.

Par contre, en dehors du contexte du travail, la vaccination des travailleurs qui présenteraient un risque personnel en raison de l’âge ou parce qu’ils sont porteurs de maladies chroniques devrait bien sûr être offerte. 

Type de publication
ISBN (électronique)
2-550-46650-0
ISBN (imprimé)
2-550-46651-9
Notice Santécom
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