Réutilisation d'effluents de stations de traitement d'eaux usées domestiques pour l'irrigation d'un terrain de golf

Le présent avis vise à documenter les critères de contamination microbiologique liés à l’utilisation d’effluents d’eaux usées domestiques après traitement pour l’irrigation de terrains de golf. Les aspects reliés à la contamination chimique, bien que soulevés, ne font pas partie intégrante de cette évaluation. Ils devront faire l’objet d’une évaluation particulière par le MDDEP afin de s’assurer qu’ils ne comportent pas de risque pour l’environnement et la santé des populations avoisinantes.

La réutilisation d’eaux usées est de plus en plus fréquente dans le contexte où une certaine pénurie en eau est observée dans plusieurs régions de la planète. Cette réutilisation des eaux en milieu urbain pour l’irrigation des terrains de golf est une pratique courante. Toutefois, à notre connaissance, aucune utilisation similaire n’a encore été autorisée au Québec.

Plusieurs aspects doivent être pris en considération avant d’opter pour un tel usage. Ainsi, il convient de vérifier en premier lieu quelles sont les autres sources d’eau potentiellement utilisables pour les besoins envisagés. Si l’utilisation d’eaux usées est retenue, les considérations de santé publique devront prioritairement être évaluées. Également, les impacts potentiels sur l’environnement devront être analysés adéquatement. Enfin, les aspects liés aux préoccupations sociales pouvant ressurgir suite à l’adoption d’une telle utilisation devront être considérés.

Compte tenu de l’exposition limitée de la population avoisinante et de celle fréquentant le terrain ainsi que la possibilité de mise en place de mesures de contrôle, l’INSPQ formule les recommandations générales suivantes concernant l’utilisation d’eaux usées traitées pour l’irrigation d’un terrain de golf :

  • Nous sommes en accord avec les propositions du MDDEP concernant la qualité microbienne des eaux à l’effluent devant servir pour l’irrigation. Ainsi, il devra y avoir respect des critères microbiens proposés pour l’utilisation des eaux usées traitées (après photoréactivation) soit une moyenne géométrique de 20 E. coli/100 ml (concentration moyenne mensuelle) avec une concentration maximale de 200 E. coli /100 ml ou coliformes fécaux. Si la contamination s’avère plus élevée que ces critères, des correctifs devront être apportés afin d’abaisser cette contamination à la concentration souhaitée avant toute nouvelle utilisation des eaux usées.
  • Afin de s’assurer de la conformité des critères microbiens, le MDDEP devra déterminer une fréquence d’échantillonnage permettant de suivre adéquatement l’efficacité de traitement des équipements et de la contamination bactériologique de l’eau utilisée pour l’irrigation. Outre les variations climatologiques, cette fréquence d’échantillonnage devra prendre considération des possibilités de variations de l’efficacité de traitement (débits lors de fortes pluies, turbidité, etc.).
  • Le système de désinfection par traitement ultraviolet devra être surveillé étroitement en incluant une technologie permettant de détecter les bris ou problèmes de fonctionnement. La turbidité ne devra pas compromettre l’efficacité de désinfection des UV et ainsi assurer une qualité microbienne sous les seuils recommandés.
  • Les aspects liés à la contamination potentielle d’origine chimique (ex. : apport en nutriments, nitrates) ainsi que la problématique liée aux odeurs devront être évalués adéquatement.
  • Afin de limiter l’exposition des personnes fréquentant le terrain de golf :
    • l’utilisation des gicleurs devra se faire en dehors des heures où le public et les employés sont susceptibles de se trouver dans les zones irriguées;
    • les équipements et composantes servant à l’irrigation des eaux usées devront être clairement identifiés afin d’éviter toute utilisation fortuite de ces eaux;
    • il devra y avoir une surveillance régulière du système de distribution d’eaux usées pour s’assurer de son utilisation adéquate;
    • le personnel attitré à l’utilisation des eaux usées pour irrigation devra être formé adéquatement et avisé des risques inhérents à l’utilisation des eaux usées;
    • par souci de protection de la santé publique, les usagers fréquentant le terrain de golf devront être avisés de l’utilisation d’eaux usées traitées pour l’irrigation du terrain afin qu’ils évitent de s’exposer à ces eaux;
    • à tout endroit où il y a utilisation d’eaux usées, il devra y avoir affichage avec identification qu’il s’agit d’eau non potable et préciser les usages restreints de son utilisation.
  • Afin de limiter éventuellement l’exposition de la population près des terrains irrigués :
    • du fait de la dispersion possible des agents pathogènes par le vent, la zone tampon proposée par le MDDEP pour les terrains irrigués devra être élargie à au moins 100 mètres pour les zones habitées et les sources d’alimentation en eau potable;
    • afin de réduire au maximum les risques de contacts directs ou indirects avec les eaux giclées, il est recommandé d’utiliser des brise-vents (ex. : arbres) en bordure des terrains résidentiels et autres endroits fréquentés;
    • il ne faudra pas utiliser les gicleurs en période de forts vents ou lorsqu’ils soufflent en direction de zones sensibles aux aérosols.
  • Enfin, dans un objectif d’évaluation du risque à la santé, réaliser une étude de caractérisation des principaux micro-organismes (virus, bactéries, parasites) retrouvés à l’eau traitée utilisée pour l’irrigation ainsi que dans les aérosols.

En respectant ces directives, nous considérons que le risque d’infection microbienne, bien que possible, demeure très faible. La surveillance étroite du respect de ces directives demeure essentielle à la protection de la santé publique. Un relâchement de ces mesures signifierait un risque accru d’exposition à l’eau contaminée et, par le fait même, d’atteinte à la santé.

Enfin, dans un souci de transparence, la municipalité devra prévoir un programme d’information auprès de sa population afin de s’assurer de l’acceptabilité sociale liée à l’utilisation des eaux usées traitées pour l’irrigation d’un terrain de golf.

Auteur(-trice)s
Denis Gauvin
M. Sc, conseiller scientifique, Institut national de santé publique du Québec
Type de publication
ISBN (électronique)
2-550-47652-2
ISBN (imprimé)
2-550-47651-4
Notice Santécom
Date de publication