Insalubrité domiciliaire : une condition difficile à définir

Un sondage effectué en 2014 auprès des DSP, de l’INSPQ et du MSSS a fait ressortir que l’interprétation du concept d’insalubrité ne fait pas consensus et que les interventions de santé publique en lien avec l’insalubrité sont très variables d’une région à l’autre (Dufour-Turbis, Levasseur, et al., 2015; St-Jacques, 2014). De même, en 2015, des groupes de discussion composés de professionnels du secteur municipal, du milieu de l’habitation sociale et privée, de la santé ainsi que d’organismes à but non lucratif ont révélé que les intervenants avaient une idée plutôt « intuitive » de ce qu’est l’insalubrité, mais que le concept leur semblait plus subjectif qu’objectif (Dufour-Turbis, Levasseur, et al., 2015).

Il existe quelques définitions de l’insalubrité dans différents textes juridiques québécois. D’une part, le Code civil du Québec précise qu’un logement « impropre à l’habitation » ne peut pas être offert en location. L’article 1913 indique que « le logement dont l’état constitue une menace sérieuse pour la santé ou la sécurité des occupants ou du public, ou celui qui a été déclaré tel par le tribunal ou par l’autorité compétente », peut être qualifié d’impropre à l’habitation.

D’autre part, la Loi sur les compétences municipales (chapitre C-47.1) indique que les municipalités peuvent adopter des règlements sur la salubrité et les nuisances, sans y être toutefois obligées. Une analyse des règlements sur la salubrité de plusieurs municipalités québécoises souligne que certaines d’entre elles définissent clairement les concepts de salubrité ou d’insalubrité (Dufour-Turbis, Levasseur, et al., 2015). Par exemple, le Règlement sur la salubrité des bâtiments et des constructions de la Ville de Québec précise que la salubrité désigne « le caractère d’un bâtiment ou d’une partie de bâtiment qui est, de par la qualité de son état et de son environnement, favorable à la santé ou à la sécurité des résidents ou du public en raison de l’utilisation qui en est faite ou de l’état dans lequel il se trouve » (Ville de Québec, 2017). Le Règlement sur la salubrité, l’entretien et la sécurité des logements de la Ville de Montréal stipule quant à lui qu’un « bâtiment ou un logement ne doit pas porter atteinte à la santé ou à la sécurité des résidents ou du public en raison de l’utilisation qui en est faite ou de l’état dans lequel il se trouve » (Ville de Montréal, 2003).

D’autres municipalités, comme la Ville de Trois-Rivières, n’offrent pas de définition de la salubrité, mais interdisent certaines conditions ou certains éléments dans les logements qui peuvent être considérés comme des facteurs d’insalubrité. Parmi les principaux éléments ayant trait à l’insalubrité mentionnés dans une vingtaine de règlements municipaux, il faut mentionner la détérioration et la malpropreté d’un bâtiment, la présence d’animaux morts, de vermines, de rongeurs, d’insectes, de moisissures ou de conditions favorisant leur présence, l’encombrement ou l’accumulation de déchets ou de matières en décomposition ainsi que la présence de produits générant des vapeurs nauséabondes ou toxiques. Ces règlements ne fournissent cependant pas de repères quantitatifs (p. ex. valeurs guides) afin de déterminer la présence d’une situation d’insalubrité (Dufour-Turbis, Levasseur, et al., 2015).

L’absence de définition harmonisée de la notion d’insalubrité au Québec constitue un problème pour les personnes qui doivent intervenir auprès de la population. En effet, les nuances dans l’interprétation de la notion d’insalubrité par les différents acteurs mettent en lumière l’incertitude entourant les rôles et responsabilités de chacun d’entre eux lors des interventions en lien avec la qualité de l’air intérieur et la salubrité. La définition adoptée par une organisation (ou l’absence d’une telle définition) reflétera généralement la nature de ses interventions.