COVID-19 (SRAS-CoV-2) : Synthèse des connaissances en appui aux recommandations intérimaires sur les mesures de prévention en milieu de travail pour les travailleuses enceintes ou qui allaitent

L’élaboration et la mise à jour des Recommandations intérimaires sur les mesures de prévention en milieu de travail pour les travailleuses enceintes ou qui allaitent sont motivées par l’évolution des données probantes concernant : l’association entre une infection au SRAS-CoV-2 et des issues défavorables de grossesse, l’épidémiologie de l’infection, ses modes de transmission, et la protection conférée par une infection antérieure ou la vaccination.

La présente synthèse des connaissances rassemble les données probantes soutenant la mise à jour de cette nouvelle version des recommandations intérimaires (version 4.0) et de l’outil synthèse des recommandations facilitant leur application.

En première partie, un état des connaissances dresse un portrait de la dominance du variant Omicron au Québec, et des connaissances sur l’immunité associée à un historique d’infection au SRAS-CoV-2 et à la vaccination. Il est complété par un état des connaissances rapide des mesures de protection disponibles en milieu de travail pour les travailleuses enceintes.

  • À ce jour, aucune étude scientifique n’a étudié spécifiquement les associations entre l’immunité hybride chez la femme enceinte, caractérisée par une infection antérieure au SRAS-CoV-2 et une vaccination adéquate, et le risque de réinfection au SRAS-CoV-2 durant la grossesse, ou les issues défavorables de la grossesse.
  • Cependant, on sait que la réponse immunitaire est robuste chez les femmes enceintes, et en l’absence de données spécifiques à ce sous-groupe, il est important de tenir compte des données disponibles dans la population générale pour appuyer et guider la mise à jour des recommandations pour les travailleuses enceintes et qui allaitent.
  • De plus, dans les situations les plus à risque, la vaccination peut être complétée par des mesures de protection additionnelles, telles que le port du masque de qualité et le respect de la distanciation physique de deux mètres, afin de limiter le risque d’acquisition de l’infection, par exemple pour la travailleuse enceinte dans certains milieux de travail.

En deuxième partie, une revue rapide de la littérature a pour objectif d’investiguer le risque d’issues défavorables maternelles et fœtales en lien avec la gravité de l’infection, le trimestre de grossesse durant lequel l’infection a été contractée, et l’infection par le variant Omicron du SRAS-CoV-2.

  • Un des risques possibles d’une infection au SRAS-CoV-2 pendant la grossesse serait le risque d’accouchement avant terme, qui semble associé aux infections symptomatiques acquises au 1er ou au 2e trimestre de la grossesse avec les variants pré-Omicron. Ce risque pourrait persister dans une moindre mesure avec le variant Omicron comparativement à l’absence d’infection, mais là encore les données étaient insuffisantes. Il semblerait toutefois que le risque d’accouchement avant terme (AAT) associé à une infection par Omicron soit moins élevé que celui observé pour les infections avec les variants Delta et pré-Delta.
  • Il existe également dans la littérature une association entre une infection asymptomatique et le risque de maladie hypertensive grave de la grossesse. Toutefois, les maladies hypertensives graves sont regroupées dans un seul indicateur composite, variable selon les études. Cela ne permet pas de distinguer une association spécifique entre l’infection au SRAS-CoV-2 et le risque d’une certaine pathologie, comme l’éclampsie ou le syndrome HELPP par exemple. En clinique, il existe un continuum entre la prééclampsie, l’éclampsie, et le syndrome HELPP. L’association entre prééclampsie et infection au SRAS-CoV-2 ayant été documentée dans plusieurs études, l’absence de données probantes ciblant cette pathologie dans notre revue rapide circonscrite à trois questions de recherche spécifiques ne permet pas d’exclure ce risque pour la femme enceinte en cas d’infection. Néanmoins, les données sur une infection, symptomatique ou non, acquise au 1er ou au 2e trimestre de la grossesse sont non concluantes, laissant supposer que ce risque pourrait se concentrer sur une infection au dernier trimestre de la grossesse. Aucune littérature n’a été recensée concernant le risque de maladie hypertensive grave associée à une infection par le variant Omicron durant la grossesse, il n’est donc pas possible de conclure sur l’association entre une infection par le variant Omicron et le risque d’éclampsie ou de syndrome HELPP.
  • Les données disponibles dans la littérature sont insuffisantes pour déterminer l’existence, ou non, d’autres associations entre une infection au SRAS-CoV-2 durant la grossesse et des issues maternelles et fœtales défavorables. De plus, l’absence de comparaison de l’incidence des issues défavorables de la grossesse entre la période dominée par le variant Omicron et la période prépandémique ne permet pas de connaître les impacts de l’immunité naturelle, acquise avec une primo-infection, et/ou de l’immunité résultant de la vaccination, sur la comparaison des issues défavorables observées durant la période Omicron avec les risques de base observés avant la pandémie. L’absence de nouvelles données probantes durant la période Omicron, qui dure depuis décembre 2021, pourrait être un indicateur de l’absence d’une augmentation des issues défavorables de la grossesse avec ce variant spécifique et ses sous-lignées, ou bien une conséquence de la difficulté à identifier les cas et les contrôles avec l’abandon progressif, depuis 2022, des stratégies de dépistage massives instaurées en 2020 et 2021 au plan international.

En troisième partie, une estimation du risque d’AAT observé et simulé chez des femmes enceintes exposées au SRAS-CoV-2 a été réalisée pour évaluer la protection conférée par une infection antérieure ou la vaccination. Un premier exercice statistique a été effectué à partir des données observées dans la population québécoise pour décrire la proportion d’AAT observée chez les femmes enceintes québécoises en période pré-Omicron, en fonction de l’infection et du statut vaccinal. Un second exercice a ensuite été réalisé pour estimer par simulation statistique le nombre d’AAT associés au travail dans le contexte de la pandémie de SRAS-CoV-2 dans une cohorte de travailleuses enceintes.

  • Le risque d’AAT observé parmi 44 920 femmes enceintes durant la période pandémique pré-Omicron est supérieur au risque de base observé chez les femmes enceintes québécoises en 2019, avant l’apparition du SRAS-CoV-2. L’occurrence d’une infection pendant la grossesse pourrait être associée à une augmentation du risque d’AAT, tandis qu’une vaccination complète pourrait diminuer ce risque. Des analyses explicatives poussées seront nécessaires pour vérifier ces hypothèses, au Québec et dans les pays développés.
  • L’exercice de simulation statistique réalisé a permis d’illustrer le risque d’AAT attribuable au travail dans le contexte de la pandémie de SRAS-CoV-2 pour chaque vague de la pandémie au Québec, entre 2020 et 2022. Les scénarios présentés ne sont pas exhaustifs et comportent de nombreuses limites méthodologiques. Toutefois, ces données simulées permettent d’illustrer comment certaines mesures de protection pourraient réduire le risque d’AAT associé à une infection acquise en milieu de travail. Enfin, cet exercice de simulation permet d’estimer la fraction attribuable approximative d’AAT que les recommandations de réaffectation et de retrait préventif du programme Pour une maternité sans danger (PMSD) ont peut-être permis d’éviter tout au long de la pandémie.

Une veille active sur la COVID-19 et la femme enceinte ou qui allaite est réalisée en continu. De nouvelles données et des changements dans la situation épidémiologique au Québec pourraient justifier une mise à jour prochaine de cette synthèse des connaissances.

Note(s)

Dernière mise à jour : 7 septembre 2023

Auteur(-trice)s
Évelyne Cambron-Goulet
M.D. M. Sc. FRCPC, médecin-conseil en santé au travail, Direction de santé publique de la Montérégie et Université de Sherbrooke
Alexandra Kossowski
Direction de santé publique de Montréal
Sujet(s)
COVID-19
Type de publication
ISBN (électronique)
978-2-550-95522-1
Notice Santécom
Date de publication