Approche de prévention des traumatismes

Les fondements théoriques de l’approche de prévention des traumatismes découlent en grande partie des travaux menés il y a quelques décennies par William Haddon junior1,2,3. Un des mérites de cette approche est d’avoir changé la vision fataliste qui considérait les traumatismes comme étant le fruit du hasard et selon laquelle il était pratiquement impossible d’agir.

Cette approche place au contraire les traumatismes dans une perspective de santé publique où ces derniers sont considérés comme un phénomène prévisible et évitable.

Les traumatismes non intentionnels sont dus à une même cause : l’énergie

En considérant les traumatismes comme des phénomènes prévisibles et évitables, plutôt que comme des évènements fortuits, imprévisibles et empreints d’une certaine fatalité, ils peuvent être envisagés comme un phénomène obéissant aux mêmes principes que d’autres problèmes de santé plus classiques telles les maladies infectieuses.

Les traumatismes résultent d’un transfert subit d’énergie qui dépasse les capacités de résistance du corps humain1,2. L’énergie transférée est le plus souvent de nature mécanique (ex. : fracture), mais peut également être de nature thermique (ex. : brûlure), électrique (ex. : électrocution), chimique (ex. : intoxication) ou radiante (ex. : coup de soleil). Fait à noter, les traumatismes peuvent aussi être le résultat d’une privation subite d’énergie ou d’un élément vital (ex. : engelure, noyade). En fait, l’énergie est aux traumatismes ce que sont les microorganismes aux maladies infectieuses. 

Ils résultent de l’interaction entre un individu et un objet porteur de l’énergie dans un environnement donné

C’est en s’intéressant à l’interaction entre un individu et un objet porteur de l’énergie qu’on peut mieux comprendre la genèse des traumatismes et déterminer les différents moyens de prévention. À titre d’exemple, dans le cas d’un traumatisme à la tête causé à un joueur de hockey par une rondelle, on peut s’intéresser aux comportements (facteur humain), aux équipements de protection (facteur technologique), à la structure de la baie vitrée (facteur lié à l’environnement physique) ou aux règles du jeu (facteur lié à l’environnement socio-économique).

Certains outils facilitent la compréhension des traumatismes et la recherche de solutions

Deux outils fréquemment utilisés ont été développés par Haddon. L'utilité principale de ces outils est d’examiner l’ensemble des composantes d’un traumatisme et des mesures de prévention possibles.

Le premier outil est la matrice de Haddon qui permet d’identifier les facteurs associés aux traumatismes. Les composantes verticales de cette matrice correspondent à quatre catégories de facteurs, soit les facteurs humains, les facteurs technologiques, les facteurs liés à l’environnement physique et ceux liés à l’environnement socio-économique. Les composantes horizontales de cette matrice sont, quant à elles, constituées de trois phases définies en regard de l’« évènement » à l’origine du traumatisme, soit la période précédant l’évènement, la période pendant laquelle a lieu l’évènement et la période après l’évènement.

Globalement, l’identification de ces facteurs permet d’orienter les actions vers l’atteinte de trois objectifs : 1) prévenir l’évènement à l’origine du traumatisme, 2) réduire l’incidence ou la gravité des traumatismes lorsque l’évènement se produit et 3) en diminuer les conséquences.

Le deuxième outil permet quant à lui d’identifier les mesures de prévention des traumatismes. Il s’agit des stratégies de Haddon. Ces dix stratégies, qui ont l’énergie pour cible principale, permettent pour un type de traumatisme donné de compléter la recherche des solutions amorcée lors de l’identification des facteurs de risque (ou de protection). Ces différentes stratégies peuvent agir avant que l’évènement ne survienne, pendant l’évènement ou après l’évènement.

Certains principes peuvent être utiles dans le choix des mesures à implanter

Afin de choisir les meilleures mesures à implanter, les principes suivants doivent être pris en compte :

  • Agir là où ça fait le plus mal, c’est-à-dire sur les problèmes les plus importants en termes de nombre, de gravité et de conséquences.
  • Agir sur le maillon le plus faible de la chaîne causale, c'est-à-dire sur les facteurs qui peuvent être changés le plus facilement.
  • Adopter une stratégie de prévention agissant sur plusieurs facteurs à la fois.
  • Agir là où c’est le plus rentable, c'est-à-dire implanter la mesure qui va apporter un maximum d’effets à moindre coût.

Références

  1. Haddon W. (1980). “Conference on the prevention of motor vehicle crash injury, proceedings”. Israel Journal of Medical Science. Vol.16 (1):45-68.
  2. Haddon W, Baker SP. (1981). “Injury control”. Dans: Clark D., MacMahon B., rédacteurs. Preventive and community medicine. Little, Brown and Company : 109-140.
  3. Haddon W. (1973). “Energy damage and the 10 countermeasure strategies”. Journal of Trauma. Vol.13:321-331.
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