Estimation des impacts sanitaires de la pollution atmosphérique au Québec : essai d'utilisation du Air Quality Benefits Assessment Tool (AQBAT)

La recherche scientifique a démontré que la pollution atmosphérique a des effets néfastes sur la santé de la population. L'exposition aux contaminants de l'air qui constituent cette pollution est associée à une augmentation de la mortalité et de la morbidité reliées notamment aux systèmes respiratoire et cardiovasculaire. Les études ont de plus montré qu'il n'y a pas de concentration de contaminants en deçà de laquelle aucun effet n'est observé. En outre, la santé de certains est davantage touchée par ces contaminants présents dans l'air : les foetus, les enfants ainsi que les personnes malades ou âgées. L'objectif du présent rapport est de fournir une estimation des impacts sanitaires de la pollution de l'air sur la population québécoise. Cette estimation a été réalisée au moyen d'un outil élaboré par Santé Canada : le modèle de simulation Air Quality Benefits Assessment Tool (AQBAT).

AQBAT met en relation des données sur :

  1. des fonctions concentration-réponse;
  2. des mesures de concentrations des principaux contaminants de l'air;
  3. des indicateurs sanitaires et
  4. la démographie.

Les fonctions concentration-réponse sont des estimations de l'impact de contaminants sur la fréquence de problèmes de santé au sein d'une population. Les contaminants de l'air pour lesquels AQBAT permet l'estimation des impacts sanitaires sont l'ozone, les particules fines (PM2,5), le dioxyde d'azote (NO2), le monoxyde de carbone (CO) et le dioxyde de soufre (SO2). Quant aux données d'indicateurs sanitaires, elles servent à établir la fréquence des problèmes de santé qui peuvent être causés par la pollution atmosphérique. Des projections des données démographiques utilisées dans l'outil (recensement de 2001) ont permis d'établir les comptes de population par région géographique et par groupe d'âge.

Les impacts sanitaires de la pollution atmosphérique ont été calculés pour l'année 2002, soit l'année la plus récente pour laquelle les données nécessaires pour le calcul de ces impacts étaient disponibles dans AQBAT. Les calculs ont été faits de manière à représenter les effets sanitaires engendrés par l'exposition aux contaminants résultant des activités humaines. Les estimations ont pu être réalisées pour environ la moitié de la population québécoise seulement, étant donné que, pour certaines régions du Québec, aucune donnée relative aux concentrations de contaminants présents dans l'air n'est disponible. Une estimation conservatrice indique que l'exposition aux PM2,5, à l'ozone et au NO2 en 2002 est associée à :

  • 1 974 (± 467) décès prématurés;
  • 38 (± 32) visites à l'urgence pour des problèmes cardiaques;
  • 414 (± 92) visites à l'urgence pour des problèmes respiratoires;
  • 246 705 (± 104 624) journées de symptômes d'asthme.

L'exposition au CO et au SO2 est également associée à des effets sur la santé de la population, mais ceux-ci n'ont pas été inclus dans l'analyse puisqu'ils sont considérés comme moins fiables. En effet, la concentration de ces deux contaminants varie beaucoup spatialement, et les données disponibles sur les concentrations ambiantes dans l'air ne sont pas assez bien distribuées spatialement pour représenter adéquatement l'exposition de la population.

Par la suite, la valeur monétaire reliée à ces impacts sanitaires a été estimée par AQBAT au moyen de l'approche par fonction de dommages. L'analyse démontre que la société serait prête à dépenser environ 10 G$ annuellement pour éviter les impacts sanitaires attribuables à la pollution atmosphérique. La plus grande partie de ce montant est imputable à la valeur associée aux mortalités prématurées. Il faut cependant noter que l'estimation monétaire ne représente pas des coûts réels; ces dépenses ne sont pas effectuées dans la réalité. Il s'agit plutôt de la valeur estimée de l'évitement des impacts sanitaires estimés par AQBAT. Le constat selon lequel la pollution atmosphérique a des conséquences considérables sur la santé publique devrait encourager l'établissement de mesures sévères et efficaces en vue de contrôler les émissions polluantes en cause. Ces émissions proviennent de différentes sources comme le transport, le chauffage au bois et les industries. Il importe donc de s'attaquer efficacement à ces différentes sources afin de réduire le poids des conséquences néfastes de la pollution sur la santé de la population. Finalement, l'évaluation monétaire des impacts sanitaires révèle que la société accorde une très grande valeur à la santé.

Auteur(-trice)s
Maryse Bouchard
Université du Québec à Montréal
Audrey Smargiassi
Institut national de santé publique du Québec, Direction de santé publique de Montréal et Centre de recherche Léa-Roback
ISBN (électronique)
978-2-550-53758-8
ISBN (imprimé)
978-2-550-53757-1
Notice Santécom
Date de publication