Croyances, opinions et connaissances des élèves québécois en matière de tabagisme, 2006-2007 et 2008-2009

L’adolescence constitue une période critique en matière de tabagisme. En effet, la majorité des fumeurs d’âge adulte rapportent s’être initiés à l’usage du tabac à l’adolescence. De la multitude de facteurs identifiés dans la littérature comme déterminants de l’initiation à l’usage du tabac chez les adolescents, plusieurs relèvent des perceptions des jeunes à l’égard du tabagisme.

La manière dont les jeunes du secondaire perçoivent le tabagisme a un lien important avec l’influence de leur entourage, à commencer par celle des membres de leur famille et de leurs amis. Bien qu’il ait déjà été amplement démontré que la présence de membres de la famille ou de pairs qui fument augmente la probabilité de fumer chez l’adolescent[1,6-15], l’explication d’un tel phénomène demeure à ce jour incomplète. De manière classique, cette relation est conçue comme le produit de mécanismes de médiation tels que la modélisation, la normalisation ou encore l’incitation[15-17]. Rodriguez, Romer et Audrain-McGovern (2007) proposent pour leur part un modèle de médiation spécifique stipulant que l’exposition au tabagisme de membres de la famille ou de pairs est susceptible d’affecter la manière dont l’adolescent perçoit les risques posés par le tabagisme sur sa santé (identification d’effets positifs découlant de l’usage du tabac, minimisation des effets nocifs du tabac sur la santé), ces croyances pouvant à leur tour influencer l’initiation au tabagisme comme telle.

Outre l’influence exercée par l’entourage, il semble que les caractéristiques du milieu scolaire dans lequel évoluent les élèves jouent un rôle déterminant sur leur perception du tabagisme. En effet, la présence ou l’absence de conditions visant à restreindre et à dénormaliser l’usage du tabac en milieu scolaire contribue à façonner les perceptions des élèves vis-àvis du tabagisme, et donc à influencer leur degré de susceptibilité à l’initiation tabagique. À cet effet, une analyse multiniveaux conduite par Sabiston et collab. (2009) a mis en évidence le rôle joué par les politiques scolaires en matière de tabagisme sur l’initiation à l’usage du tabac chez les élèves. De l’ensemble des facteurs considérés dans cette étude, certains apparaissent contribuer de manière statistiquement significative à l’adoption d’habitudes tabagiques chez les élèves : le faible degré de prohibition de l’usage du tabac sur le terrain de l’école, l’absence de programmes visant à venir en aide aux élèves désirant cesser de fumer, l’absence de personnes désignées afin d’assurer le respect de la politique antitabac de l’établissement, la courte durée d’existence des politiques en vigueur, et le fait de permettre aux élèves de fumer à l’intérieur ou à proximité des limites du terrain de l’école.

Les normes perçues ont aussi une importance dans la perception du tabagisme par les élèves. Ainsi, plusieurs études ont été en mesure d’établir que le fait de percevoir un nombre élevé de fumeurs au sein du milieu scolaire constituait un facteur augmentant la susceptibilité de fumer chez les élèves.

Chez les jeunes du secondaire, la reconnaissance des méfaits du tabac sur la santé contribue grandement à prévenir l’initiation au tabagisme. Une étude effectuée auprès d’adolescents a démontré que les fumeurs et les non-fumeurs susceptibles de commencer à fumer ont plus tendance que les autres adolescents à avoir une attitude positive envers le tabagisme, ceci se traduisant par exemple par des croyances voulant que fumer ne soit pas si dangereux pour la santé, que beaucoup d’adolescents fument et que l’opinion des amis et des parents par rapport au choix de fumer n’est pas si importante. De manière concordante, le fait de croire que le tabagisme engendre à court terme des effets néfastes sur la santé est négativement lié à l’usage du tabac un an après la complétion des études secondaires.

La grande majorité des adolescents sont informés des risques que présente le tabagisme pour la santé, mais ont tendance à sous-estimer leurs propres risques comparativement à ceux auxquels s’expose un autre fumeur. Il semblerait que plusieurs adolescents fumeurs aient également tendance à surévaluer leur aptitude à cesser de fumer avant que l’usage du tabac affecte leur santé. Ainsi, les adolescents apparaissent susceptibles de s’initier au tabagisme et d’éventuellement devenir des fumeurs quotidiens parce qu’ils sous-estiment les risques reliés au tabagisme et surestiment leur capacité à cesser de fumer selon leur désir.

Dans le contexte où les perceptions des élèves en matière de tabagisme semblent grandement influencer la probabilité qu’ils s’initient à l’usage du tabac, il convient d’examiner dans quelle proportion les élèves du secondaire au Québec entretiennent des croyances, des opinions et des connaissances favorisant le maintien d’un mode de vie sans tabac. L’objectif de cette publication consiste à présenter l’état de la situation au Québec quant aux perceptions des élèves du secondaire en matière de tabagisme, à partir des données des éditions 2006-2007 et 2008-2009 de l’Enquête sur le tabagisme chez les jeunes (ETJ).

Plus précisément, les thématiques considérées portent sur les croyances des élèves face au tabagisme, leur opinion sur différentes propositions relatives à l’acceptation sociale de l’usage du tabac, ainsi que leur connaissance des liens entre certains problèmes de santé et l’usage du tabac. Les résultats obtenus sont ensuite comparés à ceux retrouvés auprès des élèves de l’ensemble des autres provinces canadiennes afin de détecter l’existence de tendances d’ordre similaire ou distinct. Comme les élèves fumeurs ont tendance à percevoir le tabagisme différemment des élèves non-fumeurs, les données sont examinées en fonction du statut tabagique des élèves. Le portrait dégagé des résultats présentés dans ce document pourra possiblement servir à l’identification de messages-clés à utiliser dans le cadre de campagnes médiatiques et de programmes de prévention visant à réduire l’usage du tabac chez les élèves du secondaire.

Auteur(-trice)s
ISBN (électronique)
978-2-550-64886-4
ISBN (imprimé)
978-2-550-64885-7
ISSN (électronique)
1922-2475
ISSN (imprimé)
1922-2459
Notice Santécom
Date de publication