Enquête de santé auprès des Inuits du Nunavik 2004 : perception des contaminants, participation aux activités de chasse et de pêche et impacts potentiels des changements climatiques

Les activités traditionnelles de chasse, de pêche et de cueillette sont essentielles à la santé des Inuits du Nunavik. Depuis une vingtaine d’années environ, la confiance des Inuits en ces ressources et l’accès à ces dernières ont été menacés par la présence de contaminants environnementaux dans la faune, par des tendances sociales et économiques influençant le temps disponible pour la chasse et la pêche et, plus récemment, par les changements climatiques et leur incidence sur la disponibilité et l’accessibilité des ressources de la faune. Ce résumé rapporte l’information recueillie dans le cadre de l’Enquête de santé auprès des Inuits du Nunavik 2004 au sujet de ces questions.

Les aliments traditionnels, et les activités (chasse et pêche) de collecte, de distribution et de préparation de ces aliments, occupent encore aujourd’hui une place importante dans le quotidien des communautés du Nunavik. Ils comportent une valeur sociale et culturelle, une valeur économique formelle et informelle et ils contribuent à la santé physique, sociale et mentale des Inuits du Nunavik. Leur valeur revêt encore plus d’importance lorsque l’on considère le défi que représente, dans plusieurs communautés, l’accès à des aliments sains et abordables achetés à l’épicerie. De plus, près d’un tiers de la population (28 %) indique qu’elle utilise encore certains aliments traditionnels pour leurs propriétés curatives. Lors de l’enquête, la plupart des répondants (62 %) ont rapporté avoir déjà entendu parler de contaminants dans l’environnement. Respectivement 57 %, 47 %, et 38 % des participants étaient familiers avec le mercure, les BPC et le plomb, les jeunes femmes affichant les pourcentages les moins élevés de familiarité. Le quart (25 %) de la population affirme avoir modifié certains aspects de leur alimentation après avoir entendu parler de la présence de contaminants chimiques dans les aliments traditionnels ; seul un très petit nombre de répondants affirment avoir cessé de consommer ces aliments.

Malgré les changements sociaux, culturels, économiques et politiques qu’a connus le Nunavik au cours des dernières décennies, la chasse, la pêche et la cueillette de ressources naturelles, ainsi que le partage de ces aliments au sein de la communauté, demeurent des activités importantes qui réunissent les individus, les familles et les générations. Les résultats de l’enquête révèlent que près de la moitié (45 %) de la population du Nunavik va à la chasse plusieurs fois pendant l’année, et qu’un tiers (33 %) va à la pêche une fois par semaine ou plus pendant au moins deux saisons. Environ la moitié (48 %) de la population participe à la cueillette de petits fruits au moins une fois par mois pendant la saison de la cueillette. Plus de la moitié des Nunavimmiuts (57 %) ont indiqué qu’ils partageaient « souvent » leurs prises avec d’autres membres de leur communauté. Moins d’un quart (23 %) des chasseurs ont dit qu’ils avaient rejeté leurs prises dans les 12 mois précédant l’enquête pour des raisons de sécurité alimentaire. Le rejet des prises était plus souvent associé à la présence d’anomalies visibles, telles que des parasites, plutôt qu’à des préoccupations reliées à la présence de contaminants dans la faune.

Les changements climatiques observés au Nunavik et dans les autres régions nordiques pourraient avoir des effets sur la santé et le bienêtre des populations qui y résident. On sait peu de choses sur l’impact potentiel des changements climatiques sur la santé dans le Nord, notamment la sécurité des aliments traditionnels. La moitié des participants (51 %) ont indiqué que, pour la même saison, certaines espèces sont devenues plus difficiles à trouver et à chasser au cours des quatre dernières années. La raison la plus évoquée pour justifier les difficultés à trouver le caribou au cours de l’année précédant l’enquête, comparativement à la même saison de l’année antérieure, était associée au changement dans la distribution des animaux, plutôt qu’aux conditions météorologiques ou autres facteurs environnementaux.

Lors d’ateliers communautaires, les Inuits du Nunavik se sont par ailleurs montrés préoccupés par le fait que le soleil « devient plus chaud » et que les coups de soleil sont plus fréquents qu’auparavant. Selon les résultats de l’enquête, il a été estimé que 4 % des gens auraient eu un coup de soleil au cours de l’année précédant l’enquête; 33 % auraient eu des cloques/ampoules et 92 % auraient eu des rougeurs ou auraient vu leur peau peler. Étant donné que l’on prévoit une hausse de l’exposition aux rayons UVB pour les populations nordiques dans un avenir rapproché, il serait prudent de suivre l’évolution de ce phénomène au cours des prochaines années et d’augmenter les efforts d’éducation publique en ce sens.

Les résultats de l’enquête montrent l’importance qu’occupent encore aujourd’hui les activités traditionnelles dans la vie des Nunavimmiuts. Les ressources issues de ces activités pourraient cependant être menacées par des changements environnementaux incluant la présence de contaminants chimiques et métalliques ainsi que les changements climatiques. La connaissance et la vigilance des Inuits à l’endroit de ces questions devraient continuer de faire l’objet de recherches afin de s’assurer que les résidents ont accès à l’information nécessaire à la prise de décisions éclairées relativement à d’importants comportements liés à la santé, tels que l’alimentation et la consommation d’aliments traditionnels.

Auteur(-trice)s
Chris Furgal
Unité de recherche en santé publique, Centre de recherche CHUQ-CHUL
Louis Rochette
Institut national de santé publique du Québec
Type de publication
Notice Santécom
Date de publication