Chantal Camden
Monique Carrière
Sylvie Tétreault
Bonnie Swaine
Contexte :
Dans un contexte où les besoins des clientèles croissent plus vite que les ressources, les projets de réorganisation de services sont encouragés. La recherche qualitative ancrée dans l'approche socio-constructiviste permet de saisir les cascades de changements inter-reliés, la différence entre la volonté et la capacité d'agir des acteurs, ainsi que la dualité facilitante et contraignante de divers facteurs. Un projet de réorganisation qui visait à augmenter l'accessibilité et la qualité des services pour les enfants ayant une déficience physique est utilisé pour illustrer nos propos et identifier des recommandations.
Méthode :
Les acteurs (dirigeants, coordonnateurs, intervenants et familles) concernés par le projet ont participé à des entrevues (n=13) et à des groupes de discussion (n=26), ils ont répondu à des questionnaires avant (n=151), pendant (n=168) et après (n=201) l'implantation du nouveau modèle de services, et ils ont été observés durant trois ans. Les données recueillies ont été codifiées en utilisant une grille inspirée des systèmes d'action organisée et analysées en tenant compte de l'intentionnalité des acteurs, de leurs actions, des règles et ressources mobilisées ou non pour agir, des conséquences intentionnelles ou non observées.
Résultats :
Le projet est accepté globalement par les acteurs et il possède plusieurs conditions facilitantes (ex. ressources financières). La réorganisation entraîne cependant d'autres changements, certains sous-estimés (ex. l'uniformisation des pratiques). Ceux-ci posent des défis concrets et imposent une série de décisions à prendre (ex. distribuer de nouvelles ressources), de règles et ressources à réunir (ex. créer des procédures et des outils) ainsi que d'actions à poser et à coordonner (ex. développer et intégrer de nouveaux types de services). La volonté des acteurs se voit contrecarrée par les limites qu'ils rencontrent (ex. la définition des rôles, leur formation et les ressources à leur disposition). De plus, un même élément jugé d'emblée facilitant peut imposer parallèlement une contrainte (ex. un fort leadership suscite une certaine dépendance).
Conclusion :
L'approche socio-constructiviste permet de dépasser la simple énumération de facilitateurs et obstacles, et d'identifier les ingrédients réels d'un changement. La volonté ne suffit pas : c'est dans les détails opérationnels (qui, quand et comment) de l'action continue que se joue l'issu d'un changement.