Surpeuplement des logements et insécurité alimentaire au Nunavik

Maria Ruiz-Castell
Gina Muckle, Éric Dewailly, Joseph L. Jacobson, Sandra W. Jacobson, Pierre Ayotte, Mylène Riva

 

Contexte :
Les conditions inadéquates des logements dans plusieurs communautés des Premières Nations et inuites sont inquiétantes. Le surpeuplement des logements est particulièrement problématique au Nunavik où plus de 90 % de la population habite dans des logements sociaux (subventionnés): en 2006, 49 % de la population vivait dans des logements surpeuplés. La pénurie de logements dans l’Arctique et le surpeuplement des logements qui en résulte compromettent la santé des populations locales. En effet, de nombreuses études démontrent que le surpeuplement des logements a des conséquences négatives pour la santé, notamment sur celle des enfants. Il est également possible que le surpeuplement des logements soit associé à l'insécurité alimentaire. Or, peu d’études se sont penchées sur cette question. Cette étude examine si le surpeuplement des logements est associé à la prévalence de l'insécurité alimentaire des familles inuites.

Méthode :
Cette étude est basée sur des données recueillies lors du suivi d’une cohorte mère-enfant ayant participé à l'Étude sur le développement des enfants du Nunavik, au moment où ceux-ci avaient entre 10 et 13 ans. Le suivi a été mené entre octobre 2005 et février 2010.

Résultats :
Les données ont été collectées auprès de 294 mères-enfants provenant des 14 communautés du Nunavik. Les informations sur les conditions de logement, l'insécurité alimentaire et les caractéristiques socioéconomiques des ménages ont été recueillies au moyen de questionnaires. Le surpeuplement des logements est défini par le nombre de personnes par pièce. L’insécurité alimentaire est définie à l’aide de trois indicateurs : ne pas avoir suffisamment à manger, réduction des portions des adultes, puis des enfants par manque d’argent. L’association entre le surpeuplement des logements et les indicateurs d'insécurité alimentaire a été mesurée à l’aide de modèles de régression logistique, ajustés pour l’âge, le statut socio-économique et matrimonial de la mère, la côte de résidence et la saison des entretiens.

Conclusion :
Près de 62 % des familles résidaient dans des logements surpeuplés. Près de 40 % des familles ont déclaré ne pas avoir assez à manger, alors que 40 % et 27 % ont respectivement rapporté devoir réduire les portions des adultes et de leurs enfants par manque d'argent. Le surpeuplement des logements est significativement associé au risque de rapporter ne pas avoir suffisamment à manger ou de devoir réduire les portions des adultes et des enfants. Plus spécifiquement, le risque de devoir réduire les portions des enfants était 2,4 fois plus élevé dans les logements caractérisés par plus d’une personne par pièce. Ces associations sont indépendantes du statut socio-économique et des autres variables de confusion considérées.