13 février 2012

Charge de morbidité attribuable à l’environnement : examen des données probantes

Publication

Il est désormais admis que la charge de morbidité est imputable à un éventail de facteurs de risque liés aux modes de vie, à l’activité professionnelle ainsi qu’à l’environnement. Certains auteurs ont tenté de quantifier la relation entre les facteurs de risque et les problèmes de santé dès le début des années 1980. Depuis, plusieurs études ont vu le jour, mais celles ayant utilisé des données canadiennes pour estimer la charge de morbidité imputable à l’environnement (CME) sont demeurées peu nombreuses. Le Centre de collaboration nationale en santé environnementale a publié au cours de la dernière année les résultats d’un examen systématique des études portant sur la CME réalisées au Canada ou pouvant être pertinentes dans le contexte canadien (William et von Stackelberg, 2011).

Sur la base des études réalisées hors Canada, les estimations les plus modestes fixent entre 1 et 5 % la CME pour les pays développés à revenus élevés tels que le Canada, mais celle-ci pourrait atteindre 15 à 22 %. Les affections retenues pour évaluer la CME sont : les problèmes respiratoires aigus et chroniques, les maladies cardiovasculaires, la diarrhée, les troubles neurocomportementaux, le cancer et les anomalies congénitales alors que les principaux facteurs de risque environnementaux (non liés au mode de vie) considérés sont : la pollution atmosphérique, la pollution de l’air intérieur par l’usage de combustibles solides, les problèmes de salubrité de l’eau et l’assainissement, l’exposition au plomb inorganique et diverses expositions professionnelles. La grande disparité observée dans ces estimations tiendrait à l’hétérogénéité des approches méthodologiques, aux données utilisées ainsi qu’aux types d’affections et de facteurs de risque environnementaux pris en compte lors de ces études. L’examen de ces études amène également les auteurs à constater que la quasi-totalité de celles-ci s’appuie sur des avis d’experts pour tirer des conclusions quant à la CME ou à la fraction attribuable à l’environnement.

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime pour sa part qu’environ 13 % de toutes les maladies évitables au Canada seraient imputables à des causes environnementales. La pollution atmosphérique et les problèmes de salubrité de l’eau, d’assainissement et d’hygiène seraient, toujours selon l’OMS, responsables d’environ 7 % du nombre total de décès évitables. S’appuyant sur les estimations de l’OMS et sur des statistiques sanitaires propres au Canada, Boyd et Genuis (2008) ont pour leur part estimé que les maladies et les décès potentiellement évitables résultant d’expositions environnementales couteraient aux Canadiens entre 3,6 à 9,1 milliards de dollars par an en soins de santé. Selon les auteurs, ces estimations sont probablement les plus pertinentes à l’heure actuelle au Canada, mais demeurent néanmoins fragiles compte tenu de leurs assises méthodologiques. Le programme ISP (Impact sur la santé de la population des maladies au Canada,) réalisé sous l’égide de l’Agence de la santé publique du Canada pourrait représenter l’effort le plus important actuellement mis en œuvre pour estimer la CME au Canada. Ce programme est destiné à fournir des mesures agrégées de la santé de la population et à estimer l’impact de quelque 200 maladies, blessures et facteurs de risque en s’appuyant sur un indicateur unique qui permet d’établir des comparaisons.

À l’issue de ces travaux, il est permis de croire que la réduction de certaines expositions environnementales permettrait d’obtenir des gains sanitaires importants. À l’heure actuelle, la pollution atmosphérique est le facteur de risque d’origine environnementale pour lequel on dispose des données les plus probantes au Canada. [KC]